Accompagner le choc des « quatre murs »

Dans l’accompagnement, il faut cheminer entre espoir et réalisme : accompagner à la fois l’enchantement d’avoir un toit et le désenchantement des difficultés qui y sont associées.

Par exemple, ça peut vouloir dire…

Trouver un équilibre

  • Préparer simultanément la sortie de la rue et l’entrée en logement, en favorisant notamment l’établissement d’une nouvelle routine en logement, et en s’appuyant sur des acquis développés antérieurement, dont pendant la vie à la rue.
  • Trouver un équilibre entre les diverses démarches de l’installation en logement (qui peuvent être harassantes pour les personnes) et le projet de vie de la personne.
  • Il y a une « socialisation aux réalités du logement » à faire et une sensibilisation aux contraintes liées à la vie de locataire, dont le loyer et les factures à payer, la cohabitation avec les voisins.
  • Continuer à être porteurE d’espoir lorsque se termine la « lune de miel » des premières semaines ou premiers mois en logement. Il est utile de miser sur les raisons qui ont motivé la personne à sortir de la rue et de les lui rappeler pour traverser les périodes plus difficiles.
  • Garder en tête qu’il est prévisible que les comportements et les symptômes de la maladie mentale qui ont mené la personne à la rue soient encore présents en logement, au moins pendant un moment.
  • La solution n’est pas de déménager chaque fois qu’il y a un problème. Ni de reloger à tout prix. Parfois, ce sont les comportements d’une personne qui font en sorte qu’elle a de la difficulté à vivre en logement : lui permettre de le voir et l’accompagner dans l’apprentissage de nouvelles habiletés relationnelles.

Être concret

  • Prendre l’habitude de s’informer : que prévoyez-vous faire aujourd’hui? Que souhaitez-vous faire lors de la prochaine rencontre? Parce qu’entre deux visites à domicile de l’intervenantE, il y a parfois beaucoup de solitude.
  • Comme équipe clinique, il peut être utile de détailler une stratégie d’emménagement étape par étape pour ne rien échapper lors de l’entrée en logement et éviter que les personnes vivent des ennuis ultérieurement (arrimage à diverses ressources, transfert des factures au nom du locataire, plan du quartier, fiducie, etc.)
  • Explorer avec les personnes les façons de minimiser les conséquences néfastes liées à certains comportements (consommation, prostitution, jeu, amener « la rue » dans le logement, comportements agressifs,) qui les mettent à risque de perdre leur logement.
  • Sensibiliser la personne au fait que l’appartement est son milieu de vie, qu’elle a le droit d’en faire un espace personnel, distinct de la rue. En amont, la sensibiliser aux conséquences d’héberger des gens chez elle, car les lois rendent difficile l’évincement d’un colocataire devenu indésirable.

Faire face à l’isolement

  • Pour que le logement soit un levier vers le changement et s’inscrive dans un projet de vie, il y a des habiletés à acquérir, mais il y a aussi le développement d’une appartenance au logement et au quartier qu’il faut accompagner.
  • Permettre aux personnes de se raccrocher à un réseau social positif constitue un important facteur de protection face à l’isolement et aux colocataires indésirables.
  • L’arrimage avec les ressources du milieu peu permettre à la personne de développer un réseau positif et de développer une routine de vie structurante.
  • Cela dit, distinguer entre l’inconfort de l’intervenantE face à l’isolement d’une personne et le besoin de cette personne d’aller vers les autres et de sortir de l’isolement.

Il ne faut pas toujours s’empresser à sortir la personne en situation d’itinérance de la rue.

Par exemple, ça peut vouloir dire…

  • Pour plusieurs personnes, la rue est devenue un mode de vie. Paradoxalement, la personne a développé une certaine stabilité dans ce mode de vie et le quitter nécessite une préparation.

Pour en savoir plus, consultez les récits de pratiques, et notamment

Stabilisation d’un jeune par le logement supervisé
« Contrairement aux propriétaires de logements privés qui tolèrent mal les écarts de conduite et les retards dans le paiement du loyer, l’équipe se montre plus conciliante envers ses locataires. »
Équipe itinérance, CSSS-IUGS de Sherbrooke

Quand l’appartement rime avec symptômes de la maladie mentale 
« Il faut que je respecte son rythme, tout en l’aidant à trouver des moyens.
Les longs délais ne fonctionnent pas. Les non-délais non plus. Il faut savoir doser. »

Projet Chez soi à Montréal
Équipe de suivi à intensité variable (SIV), Diogène

Accompagner la sortie de la rue d’un homme psychotique dont on ne connaît ni l’identité, ni l’histoire
« Il est passé de la vie sous un arbre à la vie en logement. C’est presque un miracle! Parfois, nous oublions de respecter le rythme de la personne, tout à notre élan d’intervenant, mais avec Michel, force est de constater que nous avons fait énormément seulement en l’écoutant. »
Projet Chez soi à Montréal
Équipe de suivi intensif dans le milieu (SIM), CSSS Jeanne-Mance

« Suivre » une dame qui refuse de bouger. Accompagner une personne qui souffre d’un trouble sévère de personnalité
« Elle nous teste et ça prend des nerfs solides! »
Projet Chez soi à Montréal
Équipe de suivi à intensité variable (SIV), Diogène