Propriétaires abusifs et défense des droits : mensonges et menaces dans les rapports locatifs

Quoique les comités logement montréalais dénoncent le fonctionnement de la Régie du logement depuis plusieurs années, le Québec a la réputation d’être un endroit où les droits des locataires sont étendus et défendus, au moins davantage qu’ailleurs au Canada. Le tribunal administratif est effectivement unique en son genre au pays et le code civil protège davantage les locataires ici que dans le reste de l’Amérique du Nord. Mais pour mettre en œuvre ce droit au logement, les locataires doivent s’organiser et poursuivre leur propriétaire au tribunal administratif. Pour que leurs droits soient défendus, les locataires eux-mêmes doivent pouvoir reconnaître que leur situation est injuste, que des droits existent pour se défendre et évidemment, avoir les moyens de le faire. Or, notre recherche sur l’expérience du logement de locataires de l’arrondissement de Saint-Laurent (Goyer, 2017) montre plutôt que ce droit est difficile à mettre en œuvre parce que les rapports locatifs favorisent les propriétaires, notamment dans le cas où les locataires sont vulnérables.

Nous avons documenté l’expérience de logement d’usagers d’un comité logement à Montréal et à relever les rapports sociaux inégalitaires en présence à partir d’entrevues semi-dirigées avec des locataires et d’une centaine d’heures d’observation auprès du comité logement1. Les principaux problèmes évoqués par les locataires lors de ces rencontres et dans les entrevues se concentrent sur la question des conditions de logement, en particulier la salubrité. Aussi, pour plusieurs des locataires que nous avons rencontrés, l’expérience du logement s’entrecroise avec l’expérience migratoire, voire de l’intégration au pays.

Parmi les «épreuves» (Martuccelli, 2006) vécues par les locataires, la relation avec les propriétaires représente une des plus importantes. Dans ce texte, nous rendons compte des rapports partagés par les locataires avec les propriétaires jugés abusifs ou malveillants. Nous analysons ces rapports à partir du concept de «violence symbolique» de Bourdieu, c’est-à-dire en soulignant les formes de domination qui organisent la prise de décision, laissant ceux qui en sont victimes avec l’impression que ces formes de domination vont de soi (Bourdieu, 1994).

«Opération-séduction»

Le rapport locatif entre propriétaires et locataires s’installe avant même d’habiter le logement. Il débute avec la recherche d’un logement, de l’appel pour s’informer, jusqu’à la signature du bail. Les locataires témoignent de l’insécurité qui marque ces appels. Il ne faut pas en dire trop pour éviter de se faire dire que le logement est loué, d’autant plus si on vient d’arriver au pays et qu’on habite chez des amis ou la famille. Les refus de rendez-vous, justifiés par le propriétaire par le fait que le logement n’est plus libre («il est loué»), sont interprétés comme des rejets. Les locataires rencontrés ont généralement l’impression que le propriétaire leur ment, que c’est plutôt quelque chose qu’ils ont dit qui a posé problème.

Si le logement est libre, les locataires peuvent le visiter, mais dans le même état d’esprit : déplaire le moins possible au propriétaire. La visite se fait à la «va-vite» sans pouvoir mettre en cause certains problèmes ou s’assurer que tout est en ordre. Tout signe distinctif du locataire devient un motif de refus. Déjà, en entrant, le propriétaire peut indiquer qu’il y a déjà eu des gens qui ont visité, ce qui lui permet de refuser ces possibles locataires plus tard en affirmant que ceux qui ont visité en premier ont la priorité. Les locataires partagent la même crainte, celle d’entendre ces trois mots : «il est loué». Dans ces cas-là, les locataires s’interrogent: «serait-ce mon voile?», «parce que je suis noire?», «immigrant?», «parent?». Ils n’ont que des doutes et le refus les insécurise pour les futures visites.

Ainsi, pour avoir accès à la signature du bail, les locataires doivent séduire les propriétaires, se montrer comme un ménage qui ne déplaira ni au propriétaire, ni aux voisins. Plusieurs études ont effectivement démontré par le passé que la discrimination marque la recherche de logement pour les familles, les pauvres et les minorités (Ledoyen, 2002). L’opération-séduction se poursuit avec l’enquête de crédit, qui devrait se limiter à la démonstration par le locataire de sa capacité de payer, mais qui se transforme en enquête très intrusive pour la vie privée des locataires. Ces derniers ne sont pas en mesure de s’opposer à une telle demande : ils ont besoin d’un logement, et tout peut changer tant que le bail n’est pas signé.

Un rapport inégal

Si tout est en ordre, le propriétaire propose la signature du bail. Habituellement, les clauses y ont été définies d’avance (alors qu’officiellement elles doivent être négociées) par le propriétaire et ce dernier en fait la lecture au locataire. Lorsqu’ils sont dans l’urgence de se trouver un logement, les locataires rapportent généralement accepter le plus rapidement possible sans égard aux demandes du propriétaire. Parfois, certaines clauses sont perçues comme n’étant pas légales, mais la nécessité d’un logement est plus grande que la défense des droits et les locataires acceptent. Dans certains cas, ils acceptent même de signer le contrat dans une langue qu’ils ne comprennent pas. Un locataire affirme : «mais en même temps, c’est un peu difficile en signant le bail de demander de faire traduire ou de dire que vous ne comprenez pas» (Locataire E7).

La signature du bail représente un moment-clé parce que c’est à ce moment que s’officialisent les rapports entre le propriétaire et les locataires. Le bail comprend les clauses financières du contrat et celles de l’utilisation de l’espace. Or, la signature de ce contrat se fait dans un rapport inégal puisque, la plupart du temps, c’est le locataire qui doit convaincre le propriétaire de le choisir. En effet, les locataires pensent choisir un logement, mais en fin de compte c’est le propriétaire de ce logement qui les choisit en fonction de leur capacité de payer et de l’utilisation correcte qu’il croit qu’ils feront des lieux. Le rapport est déjà favorable aux propriétaires, qui «discriminent» les locataires les moins méritants de diverses manières : imposition d’un dépôt de garantie, d’une pénalité en cas de retard, d’une remise de chèques postdatés, par exemple. Le propriétaire a beau jeu, car si le locataire veut refuser ou reconnait que ces dispositions sont abusives, son opposition à de telles clauses peut empêcher la signature du bail – ou du moins, c’est ainsi que le locataire vit la situation.

La signature du bail pose un cadre dans lequel peut s’exercer un rapport de domination à l’avantage du propriétaire. En signant, de manière consciente ou non, le locataire entérine ce cadre, qui influencera les relations ultérieures lorsque le locataire occupera officiellement le logement. À cet égard, ce moment met en scène une double violence symbolique : celle du propriétaire envers le locataire et celle de ce dernier envers lui-même. En effet, ce cadre organise la potentielle mise à profit d’un faux consentement, forcé ou manipulé par le recours à la menace, au mépris et à la méconnaissance des droits qui sera présentée dans les prochaines sections.

Menaces

Les rapports locatifs mettent en scène des relations de pouvoir qui ne sont pas nécessairement subtiles : plusieurs locataires ont mentionné avoir été menacés par leur propriétaire. Une locataire, lors d’une observation de visite de logement, affirme que le propriétaire l’avait menacée d’expulsion parce qu’elle s’était plainte des punaises dans l’appartement. Elle affirme qu’elle a quitté son logement pour la journée pour permettre à l’exterminateur de faire son travail. Deux semaines plus tard, il y avait toujours des punaises et elle a contacté son propriétaire : «Il s’est énervé. Il a crié que tout cela c’était de ma faute, que c’est moi qui les a apportées ici. Qu’il n’y en avait pas avant». Le propriétaire lui aurait dit qu’il allait lui envoyer une lettre d’expulsion parce qu’elle est responsable.

Or, le code civil protège les locataires contre les expulsions arbitraires. En effet, toute expulsion devrait être sanctionnée par la Régie du logement, ce qui implique qu’un juge administratif entende les arguments des deux parties avant que le propriétaire puisse agir. À cet égard, c’est la Régie qui expulse et personne d’autre, à moins que le locataire n’accepte l’expulsion et ne déménage sans déposer une plainte à la Régie. Dans certains cas, les propriétaires menacent directement d’expulsion les locataires sans mentionner la Régie du logement, laissant entendre qu’ils ont, seuls, le pouvoir de le faire. Les menaces ont ainsi un impact direct sur plusieurs locataires : elles les incitent à se taire, à payer plus que nécessaire ou à accepter de nouvelles conditions au bail.

D’autres évoquent aussi que leurs propriétaires menacent de leur faire un portrait négatif s’ils souhaitent déménager. Lorsque l’on veut signer un bail, les propriétaires peuvent demander de fournir une lettre de référence de leur précédentpropriétaire. Déplaire à son propriétaire peut réduire sa possibilité de mobilité. Une locataire l’évoque dans une entrevue :«Il m’a rendu la vie difficile. Il me disait «Ah tu penses là où tu vas ils vont m’appeler [silence] alors il vaut mieux que tu sois gentille avec moi!». (Locataire E2).

Par la peur qu’elles créent, les menaces des propriétaires abusifs ou malveillants participent à la mise en œuvre des rapports de domination avec les locataires. Mais les propriétaires n’ont pas le monopole de la menace dans l’expérience du logement. Les représentants du propriétaire peuvent également menacer les locataires pour obtenir des consentements ou des paiements. Parfois, lorsque les locataires refusent «d’obéir», les concierges mettent leur menace à exécution. Dans un immeuble que nous avons visité, plusieurs locataires ont dénoncé le comportement de leur concierge qui les avaient menacés, sans être explicite sur les modes d’application de la menace s’ils ne payaient pas immédiatement le loyer. Dans le cas d’une famille avec de jeunes enfants, le concierge avait retiré les vitres d’une fenêtre et avait prétexté, lorsque questionné par les locataires, que celles-ci étaient brisées et qu’elles étaient en réparation chez le vitrier. Elles ont été réinstallées le lendemain du paiement du loyer par la famille. Dans un autre cas similaire de retard de paiement, le concierge est entré dans l’appartement et a retiré des fusibles du panneau électrique, forçant les locataires à en acheter d’autres. L’envahissement de l’espace privé des locataires leur rappelle, par la peur et l’intimidation, que cet espace ne leur appartient pas.

Mépris d’intimité

Dans leurs rapports avec les propriétaires, plusieurs locataires rencontrés sentent qu’ils n’ont pas leur mot à dire, que leur situation est sans issue. En fait, on leur fait croire qu’ils n’ont pas la légitimité nécessaire pour convaincre une autre partie de leur point de vue : ni face au présent propriétaire, ni face à un futur propriétaire, ni face à la Régie. Comme l’illustre une locataire : «Il me dit : «Vous voyez, vous pensez qu’il vont vous entendre vous? C’est moi qui paie plus les impôts […]». Il me parle d’une façon… Ils te donnent pas raison, c’est juste à lui qu’ils donnent raison. Et que tous les gens, les gens de la Régie, les responsables du logement, je ne sais pas, c’est à lui qu’ils vont donner raison, pas à moi.»

Dans d’autres cas, les locataires rapportent qu’aucune explication ne leur est donnée pour des changements au bail, pour des augmentations de loyer, pour des factures de réparations, ou même pour les réparations elles-mêmes. De telles formes de dévalorisation de l’autre et de mépris représentent également une mise en œuvre de la violence symbolique. Lorsque les propriétaires abusifs ou malveillants mettent en doute la capacité des locataires de se défendre, et donc de se responsabiliser, ou leur capacité de convaincre du bien-fondé de leur démarche, ils asseoient des rapports de domination dont ils bénéficient.

Ceci leur permet de légitimer leur revendication de l’espace du logement comme le leur, en s’appuyant notamment sur la valorisation de la propriété (par rapport à la location) et la reconnaissance que celle-ci découle d’efforts pour y accéder.Pourtant, tant qu’il s’en sert pour se loger seulement, le locataire est légalement le seul à avoir véritablement accès aux lieux. Pour entrer dans l’appartement, les propriétaires doivent avoir le consentement des locataires, au moins 24 heures à l’avance, ou ils doivent justifier leur entrée par une urgence. Or, dans plusieurs récits de locataires, ces derniers mentionnent que les propriétaires répètent qu’ils sont ici (dans l’appartement) chez eux. Ils clament qu’ils n’ont pas à demander la permission pour y entrer, certains même refusant d’enlever leurs chaussures. Ce geste est souvent perçu par les locataires comme une transgression de leur intimité, mais pour certains, cette possession de leur espace intime va de soi : «C’est normal, il est chez lui». Le mépris de l’intimité des locataires se légitime à partir de rapports inégalitaires : l’appartement est au propriétaire, donc il a le pouvoir de décider. La propriété justifie l’acceptation par les locataires de conditions imposées par le propriétaire.

Violence symbolique et mensonge

Nous avons mentionné que la signature du bail entérine les rapports inégalitaires permettant l’organisation de la domination entre propriétaires et locataires. Or, si ces derniers signent en étant parfois conscients de cette dimension, plusieurs le font en méconnaissance de cause, le propriétaire omettant des éléments centraux de l’entente. En effet, des propriétaires abusifs ou malveillants mentent sur l’état du logement, notamment en ce qui a trait à la vermine, dont les coquerelles et les punaises de lit. Sous couvert de rénovations récentes, certains cachent également des problèmes qui sont survenus dans le logement dans le passé.

Dans le cas d’une compagnie propriétaire de plusieurs logements, la stratégie utilisée pour louer des logements infestés est d’utiliser un logement témoin pour effectuer les visites avant la signature du bail. Ces logements sont propres, rénovés et sans traces de problèmes de vermines. Les futurs locataires les visitent et le représentant de la compagnie leur assure que tous les logements du complexe sont dans cet état. Les locataires acceptant de signer le bail se retrouvent ensuite pris dans un logement qui ne répond pas à ce qu’ils ont choisi et, donc, qui ne leur convient pas.

Certains propriétaires affirment que leur mensonge ou leur omission constitue une erreur de bonne foi. Un locataire nous raconte avoir signé un bail pour un appartement et, le jour du déménagement, à son arrivée, constater qu’une autre famille était déjà en train d’emménager. Le locataire appelle alors son propriétaire et ce dernier se confond en excuses, mais propose un autre logement pour le dépanner dans l’urgence : un appartement disponible de moins bonne qualité, au même prix. Le logement s’avère être infesté de punaises. Mais un nouveau bail a été signé et doit être respecté. Le locataire se retrouve dans un logement impossible à louer à cause de la manipulation du propriétaire et ce, en toute bonne foi, selon ce que nous rapportait le locataire.

Des propriétaires peuvent camoufler leurs mensonges sous forme de solutions alternatives, comme le déménagement dans d’autres immeubles qu’ils possèdent. Une locataire mentionne que son propriétaire lui a proposé un de ses logements de l’autre côté de la rue en prétendant qu’il n’y avait pas de punaises. Elle estime, avec raison, qu’il lui cachait la vérité :  «il me disait : «Ah ben, écoute, j’ai un 4 ½, un beau 4 ½». Je le voyais en face le 4 ½. Chaque fois, y avait des nouveaux locataires, après 2-3 mois, ils s’en vont. Lui, il veut me donner cet appartement-là. «C’est un bon appartement, y a pas de problème». J’ai dit : «Y a pas des punaises de lit?». Il m’a dit «Non, ni les punaises de lit, ni les punaises de rien. Tu vas y aller, tu vas voir, je te fais la même. Les 4 ½ maintenant c’est 700-800 $, moi je le fais à 600 $». Vous voyez, il a une méthode de parler qui vous laisse croire ce qu’il dit alors que c’est un grand menteur. Mais quand tu l’entends, tu te dis que peut-être que[…] là, il est sérieux. Il y avait une voisine à côté, elle m’a avertie, elle m’a dit : «Tu sais le 4 ½ où il veut t’envoyer». Elle m’a dit : « Y a les punaises, y a les rats, il y a toutes les bestioles elles sont là-bas». J’ai dit : «C’est pas vrai».

Certains locataires estiment que les propriétaires utilisent des arguments non-recevables pour expliquer leurs comportements et leurs décisions. Face à des demandes ou à des constats sur leur logement, les locataires se font dire que le propriétaire n’y peut rien, que ce n’est pas de sa responsabilité. Dans le cas spécifique des vermines, des propriétaires rejettent la responsabilité sur les autres locataires et mentionnent que c’est vers eux que les plaignants devraient se tourner, alors que ces questions relèvent légalement de la responsabilité des propriétaires. Dans le cas de problèmes de refoulement de conduites d’eau, des propriétaires ont accusé les locataires d’être responsables des bouchons et ont parfois même imposé des frais aux locataires pour le nettoyage des tuyaux.

Dans ces divers cas, la violence symbolique passe par le mensonge, qui permet aux propriétaires abusifs ou malveillants d’assoir leur pouvoir dans la relation locative et de profiter des situations difficiles des locataires pour leur refiler des logements de mauvaise qualité, difficilement louables.

La méconnaissance des droits

Au-delà de la menace et du mensonge, la méconnaissance des locataires de leurs droits participe aux rapports inégalitaires qui peuvent limiter leurs choix, leurs décisions et leur capacité d’agir. Le Québec a mis en place un cadre de protection des locataires dans les années 1970, parmi les plus contraignants d’Amérique du Nord (Thomasset, 1987). Toutefois, ce cadre s’inscrit dans des dispositions juridiques mettant de l’avant l’idée de bonne foi et ne reconnaissant pas le caractère inégal des relations locatives (Gallié, Brunet et Laniel, 2016) dont des propriétaires abusifs ou malveillants peuvent chercher à tirer profit. Ces dispositifs reposent sur la mobilisation des locataires pour mettre en œuvre la défense de leurs droits. Or, si le locataire ne connait pas ses droits, il ne peut les défendre. Cette méconnaissance est présente au départ de la relation locative et perdure par la suite, venant teinter les relations entre les locataires et les propriétaires. Même si notre recherche se base sur des récits de locataires d’immigration récente, cette méconnaissance des droits ne leur est pas exclusive. En effet, elle est également présente dans le cas des locataires nés au Canada ou ayant immigré depuis longtemps.

Nous n’avons pas rencontré de propriétaires, et nous ne pouvons donc pas affirmer qu’ils profitent consciemment de cette méconnaissance. Toutefois, plusieurs locataires estiment que cette méconnaissance les a désavantagés et ils ont le sentiment que leur propriétaire en a profité.

Les comités logement peuvent assister les locataires dans leurs représentations auprès des propriétaires. Toutefois, ces comités sont également méconnus des locataires, d’autant plus que ces derniers estiment que le travail de défense de leurs droits est effectué par la Régie. Dans plusieurs des entrevues, les locataires ont mentionné avoir entendu parlé du comité «par accident» et dans les observations, le comité et son travail étaient inconnus des résidents.

Ces constats démontrent que le droit au logement ne peut constituer seulement un ensemble de disposition juridiques permettant d’encadrer et d’arbitrer les conflits ou griefs entre les parties. Le droit au logement gagnerait d’être inscrit dans un ensemble de politiques sociales permettant de démarchandiser le logement par le développement du logement social, coopératif et communautaire. Cela permettrait aux locataires d’avoir davantage d’alternatives au marché locatif privé. Mais ces politiques ne peuvent faire l’impasse sur une réglementation plus musclée des rapports locatifs, notamment par l’imposition d’un registre des baux comme le revendiquent les comités logement depuis plusieurs années.

Notes

  1. Concrètement, la recherche a débuté avec l’organisation d’un forum sur le logement à Saint-Laurent qui a servi de base pour recruter 12 participants aux entrevues. Simultanément, lors du forum, nous avons recueilli les propos d’une centaine de participants pendant les quatre ateliers organisés pendant la journée (logement social, accessibilité, droits et responsabilités, salubrité). Suite aux entrevues, des observations participantes auprès du comité logement ont été effectués lors de 5 ateliers sur les droits et responsabilités des locataires, lors de 25 visite de logement pour informer les locataires et lors de 10 rencontres de locataires suite à des problèmes d’infestation de punaises et/ou de coquerelles, à leur domicile ou dans les locaux du comité.

Références

Bourdieu P. (1994), « Stratégies de reproduction et modes de domination ». Actes de la recherche en sciences sociales, 105(1), 3-12.

Dubet, F. (1994), Sociologie de l’expérience. Paris : Seuil.

Goyer, R. (2017), Déménager ou rester là ? Rapports sociaux inégalitaires dans l’expérience des locataires, Thèse de doctorat, Université de Montréal.

Ledoyen, A. (2002), Regard des petits propriétaires sur les demandeurs de logement : étude exploratoire sur les perceptions et les attitudes des petits propriétaires envers les clientèles des minorités ethnoculturelles, Montréal : Commission des droits de la personne du Québec et Immigration et métropoles.

Martuccelli, D. (2006), Forgé par l’épreuve : l’individu dans la France contemporaine, Paris : Armand Colin.

Ville de Montréal (2014). Profil des ménages et des logements: Arrondissement de Saint-Laurent, Montréal: Division de la planification urbaine, Direction de l’urbanisme.