Portrait des pratiques contraceptives

Nous avons voulu mieux connaître les particularités des pratiques contraceptives des femmes immigrantes du Québec. Pour cela, nous avons étudié des données statistiques gouvernementales en comparant les femmes immigrantes et celles qui sont nées au pays.

Le principal constat est que l’on observe des inégalités sur le plan de la santé sexuelle et reproductive chez les femmes immigrantes au Québec.

Ce que disent les données que nous avons analysées

Une utilisation moindre de la contraception et des problèmes d’accès à la contraception médicalisée

Tout d’abord, on observe que les néo-Québécoises sont plus nombreuses à ne pas utiliser de contraception lorsque comparées aux Québécoises nées au Canada. Les femmes immigrantes sont plus susceptibles de n’utiliser aucune contraception.  

On relève également une moindre utilisation de la pilule, du stérilet et de la ligature des trompes, ces trois méthodes ayant été regroupées dans la catégorie des méthodes de contraception féminine médicalisées.   

Des choix de méthodes contraceptives spécifiques

De manière plus précise, on constate que les Québécoises nées au Canada ont plus souvent recours à la pilule et à la vasectomie de leur partenaire pour éviter des grossesses non planifiées, alors que l’utilisation du condom est privilégiée par les néo-Québécoises.  

Or, ce moyen contraceptif est moins efficace que les méthodes médicalisées : le taux d’échec contraceptif est plus élevé avec le condom et son utilisation dépend de la bonne volonté du partenaire. Ainsi, les méthodes davantage utilisées par les femmes immigrantes ne sont pas toujours les plus favorables à leur autonomie au plan procréatif. 

Des pratiques contraceptives influencées par l’âge et les revenus, et par le niveau de scolarité pour les femmes nées au pays seulement

  • Le faible revenu est un frein important à l’utilisation d’une contraception pour les femmes immigrantes :

Les liens entre les pratiques contraceptives et le niveau de revenu se traduisent différemment si les femmes sont immigrantes ou non : les néo-Québécoises ayant un faible revenu sont beaucoup moins susceptibles d’utiliser la contraception que les femmes à faible revenu nées au pays. 

  • Les femmes immigrantes âgées de plus de 35 ans ont moins tendance à utiliser la contraception que les femmes nées au pays :

Les écarts d’utilisation d’une contraception, selon que les femmes sont immigrantes ou pas, varient selon la tranche d’âge : il n’y a pas d’écart significatif entre les femmes immigrantes et celles nées ici dans la tranche d’âge de 25 à 34 ans, mais les écarts se creusent après 35 ans. 

  • Le niveau d’éducation est plus déterminant pour l’utilisation de la contraception chez les femmes nées au pays   

L’usage d’une contraception n’est pas lié au niveau de scolarité pour les femmes immigrantes, alors que ce facteur est déterminant pour les femmes nées ici. En effet, les Québécoises nées au Canada qui ont une scolarité de niveau DEC ou universitaire ont davantage recours à la contraception que celles n’ayant pas fait d’études supérieures, mais cette différence n’est pas observée chez les néo-Québécoises.  

Comment peut-on expliquer ces observations ?

Trois grands facteurs peuvent expliquer la moindre utilisation de la contraception et des méthodes médicalisées chez les néo-Québécoises.   

  1. Un accès difficile aux services :

Une des explications pouvant être donnée aux différences de pratiques contraceptives, selon le fait d’avoir immigré ou non, concerne les obstacles rencontrés dans les parcours de soins. En particulier, ces obstacles sont :  

  • La difficulté à naviguer dans le système de santé québécois, connu pour sa complexité.
  • La difficulté à créer un lien de confiance avec le personnel soignant.  

Ces obstacles seront examinés de manière plus précise dans la section consacrée à cet enjeu central. 

2. Un accès difficile à l’information :

Les problèmes d’accès à l’information concernant la santé reproductive ont plusieurs causes. En premier lieu, la littératie en santé reproductive varie beaucoup selon l’arrière-plan socio-économique, le niveau de scolarisation et les référents culturels des femmes. Le manque de connaissances concernant les méthodes de contraception peut ainsi faire obstacle à leur utilisation.

En second lieu, quand la barrière de la langue nuit à la compréhension écrite et à la qualité de la communication avec les soignant·es, l’accès aux informations concernant la contraception est rendu plus difficile.  

3. La précarité économique et sociale :

La précarité économique et sociale des femmes immigrantes est un autre facteur explicatif. Nos données montrent en effet que les néo-Québécoises sont surreprésentées dans les ménages à faible revenu, et la pauvreté a un impact négatif sur l’accès aux soins de manière générale. Cela peut également faire obstacle à l’utilisation de contraceptifs plus coûteux, qui ont souvent un taux d’efficacité plus élevé pour prévenir des grossesses non planifiées. Le parcours d’immigration crée également une rupture dans les réseaux sociaux (familial, amical, professionnel et communautaires), alors que ceux-ci facilitent l’accès aux soins en général, et aux soins contraceptifs plus spécifiquement. 

On peut faire l’hypothèse que le parcours migratoire joue un rôle en soi dans l’utilisation de la contraception, au point de modérer l’influence du facteur du niveau de scolarité. Ces différents éléments mettent en évidence que l’expérience de la migration est un facteur qui joue un rôle important dans le parcours contraceptif des femmes.  

Ces obstacles seront examinés de manière plus précise dans la section consacrée à cet enjeu central.

/// Pour en savoir plus, vous pouvez télécharger ce document, qui présente les principaux résultats des analyses statistiques ;

//// Pour en savoir plus, voir la présentation détaillée de la phase quantitative de recherche que nous avons réalisée.